Budget

Dette publique : stopper la machine infernale

Le constat

Plus de 2600 milliards d'euros, plus que le PIB annuel soit 120%, tel est le montant de la dette accumulée depuis les années 80. Attention danger de faillite à terme d'autant que 90% sont dus à des dépenses de fonctionnement et qu'il n' y aura donc pas de retour sur investissement. En cas de retour de l'inflation, dont les signes se montrent déjà, le coût de la dette exploserait avec l'augmentation des taux. Comment éviter la cessation de paiement dans les années à venir ? Rappelons que cette cessation de paiement de l'Etat n'a rien de théorique et, si elle devait intervenir, aurait des conséquences bien réelles et tangibles pour chaque français : plus de retraite payée, plus de prise en charge à l'hôpital ou en ville, les fournisseurs non payés, l'assurance-vie bloquée par décision du gouvernement, une explosion des licenciements dans le secteur public mais aussi dans le privé qui vit aussi de la dette.

C'est donc ce scénario catastrophe qu'il nous faut éviter à tout prix et le malade est tellement atteint qu'une potion amère aujourd'hui sera toujours préférable à cette menace vitale de faillite demain. Un point d'intérêt supplémentaire coûterait 30 mds €. Encore faut-il en prendre conscience et jusqu'à présent les politiques n'ont pas le courage de dire la vérité et nous endorment sur ce risque systémique en mettant en avant le rôle de la BCE (qui n'achètera pas toujours de la dette) et la "solidarité" de nos partenaires de la zone euro (qui commencent à s'impatienter de payer pour nous !). Or le rôle des dirigeants n'est pas de gérer le pays à la petite semaine, comme ils le font depuis des années, mais d'anticiper les crises, on l'a bien vu avec la pandémie.

Les propositions

1 ) Première urgence : revenir à l'équilibre

Il y a la dette COVID et la dette accumulée par mauvaise gestion depuis 40 ans, et c'est le cumul des deux qui pose problème. Les Etats peu endettés avant la crise ne sont pas dans la même situation que la France. Or la France prévoit actuellement la plus faible réduction de déficit de la zone euro soit encore 3,9 points de PIB en 2024 (contre moins de 2 pour les autres pays). Cela n'est pas tenable. Par ailleurs, si nous ne faisons rien et que les dépenses publiques continuent à croître à un rythme annuel de 2% supérieur au PIB, elles représenteront 100% de ce même PIB dans 36 ans c'est à dire en 2056 ! Il est donc impératif non seulement de bloquer la croissance de ces dépenses mais de les réduire.

Proposition : Afin d'éviter la confusion des 2 dettes, qui ne peut que profiter au laxisme par opacité, séparer la dette COVID, qui doit faire l'objet d'un traitement et d'un remboursement spécifiques, de la dette accumulée.

Proposition : dès la sortie de crise s'attacher à réduire la dette accumulée avec une trajectoire vers zéro déficit en 5 ans. Ceci afin de conserver la confiance des prêteurs et continuer à émettre des obligations à taux attractifs pour "rouler" la dette.

2 ) Intéresser les fonctionnaires à la réduction des dépenses

Il faut bien comprendre qu'il n'y a pas de limite à la dépense publique car les freins naturels qui existent dans les autres secteurs n'existent pas en l'occurence. Il faut donc créer des freins "artificiels" pour suppléer ce manque. C'est la seule façon de contenir l'évolution de la dépense. Par ailleurs, les solutions au gaspillage existent, mais pas dans les cabinets ministériels, ni chez les cabinets d'audit... C'est sur le terrain qu'il faut aller les chercher, et cela implique de modifier radicalement l'organisation trop hiérarchique des administrations en mobilisant chaque agent sur les économies. "Penser global, agir local", ce slogan utilisé en écologie est aussi valable ici. Il faut donc passer de solutions globales (réduction de tant de milliards des dépenses, sans effet concret à la base) à la solution locale (faire de chaque service un acteur de la qualité et de la bonne gestion).

Proposition : négocier avec les fonctionnaires cette réduction en leur disant : aidez-nous à réduire les dépenses de 100 milliards et nous vous en rétrocéderont 30%, soit environ 6 000 € de revenu supplémentaire par agent et par an.

3 ) Pérénniser cette réduction en transformant radicalement le mode de gestion public

La gestion des services publics actuellement beaucoup trop centralisée et avec trop d'échelons intermédiaires, des règles statutaires démotivantes et pas assez de retours des efforts réalisés.

Propositions :

  • diminuer l'encadrement, notamment des administrations centrales, au profit du terrain, par la création de petites unités de gestion complètement autonomes au plan budgétaire ; par exemple un commissariat de police sera doté d'un budget calibré selon son importance, et dans ce cadre, libre de ses achats et investissements.
  • développer la comptabilité analytique dans les services de l'Etat avec une discussion permanente sur le coût des prestations pour sortir du système de gestion publique soviétiforme et centralisé qui est plus ou moins en vigueur depuis la Libération pour donner aux personnels de terrain la maîtrise de leurs moyens.
  • Réaliser régulièrement des "revues de pertinence" : quelle valeur ajoutée réelle apporte tel service ? Pourrait-on faire autrement pour moins cher et plus efficace ? Doit-on maintenir ce service ?

Par ailleurs, la dépense publique excessive est le symptôme d'une organisation sociale défectueuse et d'une gouvernance du pays trop centralisée et concentrée. Elle en est la contrepartie, ce qui rend politiquement acceptable ce déséquilibre du pouvoir. Par conséquent, c'est en desserrant cette organisation, en redistribuant le pouvoir de décision dans la société, que nous parviendrons à réduire la dépense publique.

4 ) Diffuser la responsabilité budgétaire, remettre "Bercy" à sa place

Les fonctionnaires des Finances sont très compétents mais on n'aurait pas dû leur confier les clés du trésor.

Propositions : que la DGFIP (Ministère des Finances) ne soit plus seule responsable de l'exécution du budget, mais que chaque ministère devienne le premier responsable de ses crédits (et à l'intérieur chaque unité autonome de gestion) avec la possibilité de conserver et redéployer 50% des économies réalisées,

  • mettre en oeuvre les règles d'amortissement, de provisionnement, de certification des comptes dans chaque ministère,
  • faire évoluer la mission de la DGFIP vers le conseil, l'information budgétaire et financière de l'Etat, sorte d'agence "Bloomberg" de la dépense publique ayant pour mission d'informer en temps réel tous les gestionnaires et de les conseiller dans leur action (comptabilité générale et analytique).

    5 ) Appliquer la "règle d'or" à l'Etat et la Sécurité sociale

    Les collectivités locales (communes, régions) ne peuvent s'endetter pour les dépenses de fonctionnement mais seulement pour les investissements (règle d'or). C'est pourquoi leur endettement est réduit (5% du total de la dette) et conforme aux principes de bonne gestion (investissement).

    Proposition : que cette règle, passée la période de transition de 5 ans, soit applicable aussi à l'Etat et aux organismes sociaux. Retirer à l'Etat sa fonction de "réassureur" des déficits des autres organismes, pour les inciter à mieux gérer.

    Mais comment faire en cas de crise, comme en 2008 ou 2020, où l'on a besoin des stabilisateurs automatiques budgétaires ?

    Proposition : on peut imaginer qu'à titre exceptionnel (chute drastique du PIB et donc des recettes), un déficit à 3% soit autorisé pour une période limitée, mais il vaudrait mieux mobiliser l'investissement dans les infrastructures ou la défense, pour relancer l’économie, plutôt que les dépenses courantes.

    6 ) Supprimer TOUS les doublons

    La France compte plus de 450 agences et opérateurs de l'Etat qui représentent une dépense de 80 Md€. Ces agences font souvent double-emploi avec les directions des ministères et les administrations locales : ainsi par exemple, l’établissement public du marais poitevin, opérateur de l’Etat créé en 2010, doublonne avec le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, les directions départementales des territoires des Deux-Sèvres, de Charente-maritime et de Vendée, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement ou encore de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne.

    Proposition : supprimer en 5 ans l'ensemble de ces agences, ou, si le ministère concerné souhaite les conserver, qu'il supprime dans son budget une dépense équivalente.