Stanislas : faux débats, vrais problèmes

Par Jean Guicheteau

L'affaire des enfants de la ministre en école privée et surtout les réactions que cela a suscité est très instructif sur l'aveuglement idéologique de la classe politique, médiatique et sociale. Nous avons évoqué dans un autre post l’hypocrisie des dirigeants politiques qui imposent aux Français un comportement de "mixité sociale", qu'ils ne souhaitent pas s'appliquer à eux-mêmes. Et on peut les comprendre, puisque l'éducation relève d'abord de la vie privée, familiale, et que l’État ne peut qu' y intervenir timidement (sauf à vivre à Sparte où on retirait les enfants à leurs parents !).

L'école privée est accusée depuis un certain temps de cultiver l'entre-soi, de pratiquer l'évitement et de refuser cette mixité sociale. D'où l'idée de lui imposer des quotas dans les contrats. Mais il y a plus : elle s'entêterait à utiliser des méthodes traditionnelles d'enseignement en refusant le pédagogisme (pratiquant la méthode syllabique plutôt que globale), et dispenserait un savoir au contenu conservateur, ignorant du combat des minorités raciales et sexuelles et promouvant une certaine déférence envers l'occident et ses traditions. Un scandale !

La réussite scolaire des élèves de Stanislas et des autres institutions privées ne se réduit pourtant pas à ces éléments sociaux.

La gouvernance, essentielle dans la performance

Qu'est-ce qui explique la réussite relative du privé par rapport au public ? Sa gouvernance, la façon dont les écoles sont gérées : plus grande autonomie de décision, budget autonome, plus de responsabilité des dirigeants, esprit d'équipe plus développé, meilleur participation des parents.

Par conséquent, c'est cet aspect qui devrait retenir l'attention de la ministre, mais curieusement, elle n'en parle pas, car ce serait une révolution dans le Landerneau éducatif public qui vit depuis 40 ans sur des chimères. Et c'est le vrai problème.

Multiplier les Stanislas en France

On pourrait bien sûr amener en bus des élèves des milieux moins favorisés à Stanislas pour en améliorer la mixité. Mais cela serait-il suffisant pour transformer le système ? Il y aurait 10 à 20% d'heureux élus qui bénéficieraient d'un meilleur enseignement, mais en quoi cela améliorerait-il la situation des 80 autres % ? Elle serait encore pire qu'avant, puisqu'il y a tout lieu de penser que le privé sélectionnerait les meilleurs élèves. La mixité sociale ne résoudrait pas un problème qui est massif et qui ne peut se résoudre qu'en imposant dans le public des méthodes de gestion et d'enseignement du privé, en somme faire des Stanislas partout en France ou en tout cas s'en rapprocher. Qui osera affronter le mammouth ?