Pouvoir d'achat : vrai débat et fausses solutions

Par Jean Guicheteau

Durant cette campagne présidentielle, la plupart des candidats se sont mués progressivement en "assistantes sociales" pour tenter de redonner du pouvoir d'achat aux français en les arrosant de subventions publiques, à coup de chèques "énergie" ou "inflation", de dégrèvement d'impôts et de cotisations, de suppression de redevance TV ou de taxe énergie...

Il s'agit d'agir sur les effets, avec un résultat immédiat, mais sans rien changer aux causes, et il y a donc tout lieu de penser que ces mesures, outre qu'elles vont accroître encore le poids des dépenses publiques, seront à terme inefficaces pour améliorer notre pouvoir d'achat. Les Electeurs-libres sont donc totalement hostiles à cette façon de procéder. Car pour agir sur les causes de cet effritement du pouvoir d'achat, il faudrait d'abord restructurer la sphère publique pour agir vraiment sur la baisse des impôts et leur simplification, ce que nous proposons, avoir une politique assumée d'aménagement du territoire et de rénovation des logements vacants, pour réduire le coût de l'immobilier, déployer une vraie politique énergétique qui diminue le coût des intrants (électricité, chauffage, transports). Et s'il faut inciter aux économies d'énergie, alors opter pour une tarification progressive qui augmente nettement en fonction de la consommation au-delà d'un socle de base comme nous le proposons. Agir sur le long terme, anticiper les problèmes, et non réagir après coup dans le désordre et la précipitation permanente, comme le fait le gouvernement actuel.

Agir sur la productivité du site "France"

Les primes, déductions fiscales ou tranferts de cotisations ne permettent pas d'augmenter durablement le pouvor d'achat et creusent les déficits. Il s'agit d'une illusion. Seule la capacité d'un pays à produire des biens et services rentables et désirables peut accroître le pouvoir d'achat de la population. Or on prend le chemin inverse : en 10 ans, la part de l'emploi industriel a été divisée par 2 mais dans le même temps les investissements à l'étranger des grands groupes français n'a cessé d'augmenter (60 % du PIB en 2019) deux fois plus que les groupe allemands ou italiens, démontrant qu'ils préfèrent produire ailleurs qu'en France. Toutes les mesures fiscales, budgétaires, de recherche et formation permettant de rendre la France plus attirante sont donc les bienvenues. Ce que proposent Electeurs-libres.

Les inégalités ne se sont pas accrues, du moins en France

Il y a un discours permanent, à gauche mais aussi à droite, affirmant que les inégalités sociales se sont accrues depuis les années 80 : la faute au "néolibéralisme" qui aurait exacerbé les différences et plongé la société dans la régression économique et sociale. Mais est-ce vraiment le cas ? Les salariés ont-ils vu leur niveau de vie régresser au profit du capital ? Que nous disent les données disponibles sur l'évolution des inégalités en Europe et aux USA ? Explications.

Dans un ouvrage récent, l'économiste Guillaume BAZOT, professeur à Paris VIII, confronte cette affirmation aux données disponibles du World Inequality Database (WID) qui permet de retracer l'évolution des revenus et des patrimoines sur une longue période (de 1950 à 2019) en France mais aussi en Allemagne, Etats-unis, Pays-bas, Royaume uni, Suède, Italie, Espagne...

1980, pas la bonne année de référence

D'après certains économistes, la part du capital par rapport au travail dans le partage de la valeur ajoutée dans ces pays n'aurait cessé d'augmenter depuis 1980. Cela est exact, mais est-ce la bonne année de référence ? Dans les années 70 en effet, on constate une progression nette de la part du travail, puis un fléchissement à partir de 1980. Guillaume BAZOT explique qu'à cause d'une inflation élevée à 2 chiffres, il y a une forte dépréciation du capital durant cette période alors que les salaires sont plutôt indexés sur les prix, ce qui en accroît mécaniquement la part. Mais en France notamment, le partage de la valeur ajoutée est stable : en 2017, la part du travail représente 53% de la valeur ajoutée et la part du capital 10% (contre 50% et 9% respectivement en 1970). Par conséquent conclut-il "la rémunération du capital ne semble pas avoir été favorisée depuis 30 ans ou 50 ans au dépens de la rémunération du travail, bien au contraire".