Le président démissionnaire, mais où est le problème ?
Par Jean Guicheteau
Macron à 11% de popularité, des "invitations" à démissionner qui se multiplient, y compris dans "son camp", on n'a jamais vu une telle situation dans l'histoire de la Vè République; une démission, suivie d'une nouvelle élection, ses concurrents (Le Pen, Philippe, Mélenchon...) en rêvent, être calife à sa place; promis, juré, en 2027, tout va changer, un nouveau président va réaffirmer la "fonction" présidentielle avec une nouvelle majorité et un programme détaillé en 45 points. Tiens donc !
Il y a bien sûr l'arrogance de Macron, son omniprésence et omniprésidence, sa prétention à vouloir "réformer la France" depuis son bureau de l’Élysée, ses déclarations pas toujours heureuses, les contradictions de son "en même temps" qui paralyse l'action politique. Mais s'agit-il uniquement de cela ?
La constitution non appliquée
Dans la typologie classique des régimes institutionnels, il n'y a que deux variantes : le régime présidentiel, comme aux Etats-Unis et dans certains pays d'Amérique du sud, et le régime parlementaire, dont la matrice a été fourni par l'Angleterre au XVII ème siècle, et appliqué dans la plupart des pays d'Europe aujourd'hui. En France, comme toujours, on ne fait rien comme tout le monde et on cherche à se distinguer. On a inventé un intermédiaire : le régime semi-présidentiel, dans lequel le président "gouverne" avec une majorité au parlement pour "soutenir" son action.
Déjà on voit une incongruité, puisque n'étant pas responsable devant le parlement, il n'y a aucune raison qu'il soit "soutenu" par une partie majoritaire de celui-ci. Certes, il a un premier ministre qui lui est responsable en principe, quoiqu'on ne sache plus vraiment si l'est devant l'assemblée nationale ou devant le président. En 1962 de Gaulle aurait dit à Pompidou, renversé par une motion de censure : "Vous n'êtes pas renversé puisque je vous garde". Alors comment s'y retrouver ? Il y a une façon très simple de le faire, qui est de relire la constitution de 1958. Et là c'est le choc : aux termes de l'article 20, le gouvernement détermine et conduit la politique de la nation et selon l'article 21, la premier ministre dirige l'action du gouvernement. Il n'est nulle part question de "domaine réservé", et quand on évoque le rôle du président, c'est aussitôt pour rappeler qu'il consiste à assurer par son "arbitrage" le fonctionnement régulier des pouvoirs publics. C'est donc bien une constitution parlementaire qui fut instituée, voulue d'ailleurs par Michel Debré, un de ses rédacteurs.
Une dérive progressive
Il y a eu une dérive, où progressivement, et notamment suite à l'élection au suffrage direct en 1965, le président s'est arrogé tous les pouvoirs, détruisant complètement l'autonomie du gouvernement (en principe constitué par le premier ministre et non à l’Élysée !), du premier ministre et même des ministres, raison pour laquelle plus personne ne veut l'être, le rôle se bornant à assumer publiquement l'impopularité de mesures prises ailleurs et par d'autres (à l'Elysée).
Des présidents de plus en plus rejetés par l'opinion
Cette évolution vers le présidentialisme de la France conduit à l'immobilisme d'un homme seul et de ses conseillers, claquemurés dans leur palais, une forme de dictature d'un seul, en violation permanente de la constitution (par celui-là même chargé de la préserver !), l'absence de débat politique (hormis lors de l'élection présidentielle et encore...) sur les grands sujets qui nous concernent, et cette situation ne peut mener qu'à la révolte du peuple face à un pouvoir qui fonctionne en roue libre.
D'ailleurs Sarkozy et Hollande (descendu à 11% de popularité lui aussi) ont aussi subi cette colère.
Par conséquent, il est urgent que Macron démissionne, non pas de ses fonctions de président, mais de cette fonction usurpée de gouvernance globale, et qu'il retrouve son rôle d'arbitre, de président de TOUS les Français, qu'il n'aurait jamais dû quitter. Il pourra alors terminer son mandat à l'échéance prévue.


